Il y a 17 ans, les rebelles du RUF entraient à Freetown

6 janvier 2016

Il y a 17 ans, les rebelles du RUF entraient à Freetown

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6 janvier 1999. Trois heures du matin. Trois explosions simultanées retentissent dans la capitale sierra-léonaise: la première à Calabar Town, la deuxième à Savage Square et la troisième à Wellington. Les Rebelles du RUF (Revolutionnary United Front) viennent d’attaquer Freetown. Il faut dire que la rumeur courait depuis quelques jours. Les rebelles avaient infiltré la capitale de la Sierra Leone en se fondant parmi les réfugies qui fuyaient la périphérie de Freetown.

Ce jour là, les rebelles se dirigent directement vers la prison de Pademba Road pour libérer les membres du RUF et les ex-militaires de l’armée nationale, ayant rejoint la rébellion, qui y sont détenus pour trahison.

Pendant les trois semaines qui vont suivre, les combattants du RUF vont semer le chaos et la terreur. Ils vont brûler des habitations, tuer des centaines de civils, violer des femmes, mutiler et même ouvrir les ventres de femmes enceintes. Cette opération est appelée« NO LIVING THINGS » , « PLUS RIEN DE VIVANT » en français.


Mais comment en sommes-nous arrivés là ?


La guerre civile en Sierra Leone a débuté en 1991, lorsqu’une centaine de combattants du RUF, dirigée par Fodé Sankoh et soutenue par Charles Taylor (ancien président du Liberia), ont attaqué deux villages de l’est du pays. Le pays était alors dirigé par Joseph Saidou Momoh.

En 1992, incapables de venir à bout des rebelles, les militaires destituent le président et créent le NPRC (Conseil National Provisoire du Gouvernement) avec, à sa tête, le capitaine Valentine Strasser.

En 1995, les rebelles continuent leurs attaques et se rapprochent de la capitale. Le gouvernement décide alors de demander de l’aide extérieure.

Le 16 Janvier 1996, le vice-président Julius Maada Bio organise un coup d’État et écarte Valentine Strasser du pouvoir. Le nouvel homme fort de Sierra Leone entame alors des négociations avec le RUF.

Le 15 mars de la même année, des élections multipartites sont organisées. Elles portent Ahmad Tejan Kabbah, chef du Sierra Leone People Party (SLPP), au poste de président de la République avec 59,5 % des voix.

Le 30 novembre, le RUF et le président Ahmad Tejan Kabbah signent un accord de paix à Abidjan. Le RUF est converti en parti politique et il est désarmé. Tous les combattants du RUF sont amnistiés.

Le 25 mai 1997, l’AFRC (Armed Forces Revolutionary Council), conduit par Johnny Paul Koroma et constitué d’un groupe d’anciens membres de l’armée de Sierra Leone, prend le pouvoir lors d’un coup d’État. Quelque temps après, le RUF et l’AFRC décident de s’allier pour diriger le pays.

Le 23 octobre 1997, sous la pression internationale, et face à la présence des troupes de l’ECOMOG (Economic Community of West African States Monitoring Group, envoyé par la CEDEAO depuis août), le RUF signe l’accord de Conakry, prévoyant le retour du président Ahmad Tejan Kabbah en avril 1998.

Le 12 février 1998, le RUF et l’AFRC sont chassés du pouvoir par l’ECOMOG. Le gouvernement du président Ahmad Tejan Kabbah retourne au pouvoir officiellement le 10 mars.

En octobre 1998, Fodé  Sankoh (arrêté au Nigeria pour détention d’une arme à feu en mars 1997) est condamné à la peine de mort par la Haute Cour de justice de Freetown. Le colonel Sam Bockarie, nouveau chef du RUF, menace de « tuer tout ce qui est vivant » s’il advenait quelque chose au chef historique du mouvement.


C’est cette menace que le RUF mettra en exécution en janvier 1999 en déclenchant l’opération « No living things ». Pendant trois semaines, Freetown sera à feu et à sang. Il y aura plus de 6 000 morts.

En tout, cette guerre civile qui aura duré vingt ans (1991-2002) aura fait environ 120 000 morts. Plusieurs milliers de personnes ont été mutilées délibérément. Nombre d’entre elles ont vu leurs mains amputées (manches longues et manches courtes), pour les empêcher de travailler et surtout de voter. Plus de 2 millions et demi de personnes ont été déplacées.

17 ans après cette tragique journée, je profite de ce billet pour rendre hommage à toutes les victimes de cette guerre qui fut l’une des plus atroces de l’histoire récente de l’Afrique.

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Commentaires

Solano
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excelent explication!